LA MÉDITATION 4

LA GRANDE PAIX NATURELLE 

Lorsque j’enseigne la méditation, je commence souvent par dire : “Ramenez votre esprit en lui-même … relâchez … et détendez-vous.” 

Toute la pratique de la méditation peut se résumer à ces trois points essentiels : ramener l’esprit en lui-même, le relâcher et se détendre. 

Chacune de ces expressions possède des résonances à de nombreux niveaux. 

Ramener votre esprit en lui-même signifie ramener l’esprit à l’état appelé “demeurer paisiblement”, grâce à la pratique de l’attention.

Au niveau le plus profond, cela consiste à se tourner vers l’intérieur et à demeurer dans la nature de l’esprit. 

C’est la méditation à son plus haut degré. 

Relâcher veut dire libérer l’esprit de la prison de la saisie dualiste. 

Vous reconnaissez en effet que toute douleur, toute peur et toute détresse proviennent du désir insatiable de l’esprit qui saisit.

A un niveau plus profond, la réalisation et la confiance qui résultent de votre compréhension accrue de la nature de l’esprit inspirent en vous une grande générosité naturelle. 

Cette générosité permet à votre coeur d’abandonner toute saisie dualiste, laissant celle-ci se libérer et se dissoudre dans l’inspiration de la méditation. 

Se détendre, enfin, signifie devenir plus spacieux et permettre à l’esprit d’abandonner ses tensions. 

Sur un plan plus profond, vous vous détendez dans la nature véritable de votre esprit, l’état de Rigpa. 

Les mots tibétains qui évoquent ce processus suggèrent le sens de “se détendre en Rigpa”. 

C’est comme si vous laissiez tomber une poignée de sable sur une surface plane : chaque grain se dépose de lui-même. 

D’une façon similaire, vous vous détendez dans votre véritable nature, laissant toutes vos pensées et émotions décroître naturellement et se dissoudre dans l’état de la nature de l’esprit.

Quand je médire, je suis toujours inspiré par ce poème de Nyoshul Khenpo : 

Laissez reposer dans la grande paix naturelle

Cet esprit épuisé, 

Battu sans relâche par le karma et les pensées névrotiques,

Semblables à la fureur implacable des vagues qui déferlent

Dans l’océan infini du samsara. 

Demeurez dans la grande paix naturelle. 

Soyez avant tout à l’aise, soyez aussi naturel et spacieux que possible. Glissez-vous doucement hors du noeud coulant de ce personnage anxieux qu’est votre moi habituel. 

Relâchez toute saisie et détendez-vous dans votre vraie nature. 

Imaginez votre personnalité ordinaire, tourmentée par les émotions et les pensées, semblable à un bloc de glace ou à une motte de beurre laissés au soleil. 

Si vous vous sentez froid et dur, laissez votre agressivité fondre au soleil de votre méditation. 

Laissez la paix vous gagner, ramener votre esprit dispersé dans la vigilance de l’état qu’on appelle “demeurer paisiblement”, et éveiller en vous la conscience profonde de la Vue Claire.

Vous trouverez toute votre négativité désarmée, votre agressivité dissoute, et votre confusion en train de se dissiper lentement, comme une brume dans le ciel immense et immaculé de votre nature absolue.

Vous voici tranquillement assis, le corps immobile, la parole au repos, l’esprit en paix. 

Permettez aux pensées et aux émotions, à tout ce qui surgit, de s’élever et de disparaître. 

Ne vous attachez à rien.

A quoi cet état ressemble-t-il ?

Imaginez, avait coutume de dire Dudjom Rinpoché, un homme qui rentre chez lui après une longue et dure journée de labeur aux champs ; il s’assied dans son siège préféré devant le feu. 

Il a travaillé toute la journée et sait qu’il a accompli ce qu’il désirait accomplir. 

Il n’a plus aucune préoccupation, car tout est achevé.

Il peut complètement abandonner soucis et préoccupations, dans le simple contentement de l’être.

Quand vous méditez, il est donc essentiel de créer dans votre esprit le climat intérieur approprié. 

Tout effort et toute lutte résultent du manque d’ouverture. 

Aussi est-il vital de créer l’environnement intérieur adéquat afin que la méditation puisse réellement avoir lieu. 

Lorsque l’humour et l’espace sont présents, la méditation s’élève sans effort.

Je n’ai pas toujours recours à une méthode particulière quand je médite. 

Je laisse simplement mon esprit s’apaiser et je m’aperçois, surtout lorsque je me sens inspiré, que je peux ramener cet esprit en lui-même et me détendre très rapidement. 

Je demeure assis tranquillement et me repose dans la nature de l’esprit. 

Je n’ai pas de doutes, je ne me demande pas si je suis ou non dans l’état “correct”. 

Il n’y a pas d’effort, mais seulement une compréhension profonde, une vigilance et une certitude inébranlable.

Quand je suis dans la nature de l’esprit, l’esprit ordinaire n’existe plus. 

Nul besoin alors de maintenir ou de confirmer un quelconques sentiment d’existence : je suis, tout simplement, dans cette confiance fondamentale. 

Et il n’y a rien de particulier à faire. 

Pour retourner à la page globale sur la Méditation I de Sogyal Rinpoché, cliquer ici avec gratitude pour ses enseignements