LA MÉDITATION 7

LES TROIS MÉTHODES DE MÉDITATION 

Le Bouddha enseigna 84 000 façons de dompter les émotions négatives et de les apaiser. Il existe, dans le bouddhisme, d’innombrables méthodes de méditation. 

Trois techniques m’ont paru particulièrement efficaces pour le monde moderne ; chacun pourra les utiliser et en tirer profit.

Ces techniques sont les suivantes : utiliser un objet, réciter un mantra et “observer” la respiration. 

 

  • Utiliser un objet 
  • Dans cette première méthode, l’esprit se pose légèrement sur un objet. 

    Ce peut être un objet dont la beauté naturelle vous inspire particulièrement, telle une fleur ou un cristal. 

    Mais support qui évoque pour vous une vérité, comme une représentation du Bouddha ou du Christ, ou plus particulièrement de votre maître, est encore plus puissant. 

    Le maître est votre lien vivant avec la vérité ; et en raison du lien personnel qui vous unit à lui, le simple fait de voir son visage vous relie à l’inspiration et à la vérité de votre propre nature.

    Beaucoup se sont découvert une affinité particulière avec la photographie de la statue de Padmasambhava appelée “Elle me ressemble”.

     Il s’agit d’une statue d’après nature, réalisée au Tibet et bénie par Padmasambhava au VIIIème siècle. 

    C’est lui qui, grâce à la puissance de sa réalisation spirituelle, établit l’enseignement du Bouddha au Tibet.

    Les Tibétains l’appellent “le second Bouddha” ou, affectueusement, “Guru Rinpoché”, ce qui signifie “précieux maître”. 

    Dilgo Khyentsé Rinpoché dit : “la noble terre de l’Inde et le Tibet, pays des neiges, connurent un très grand nombre de maîtres extraordinaires et incomparables. 

    Cependant, parmi eux, celui qui en cette époque difficile fait preuve de la plus grande compassion et du plus grand pouvoir de bénédiction envers les êtres, est Padmasambhava, qui incarne la compassion et la sagesse de tous les bouddhas. 

    L’une de ses qualités est de pouvoir accorder instantanément ses bénédictions à quiconque lui adresse ses prières et, quel que soit leur objet, d’exaucer immédiatement tous nos souhaits.”

    Dans cette inspiration, placez une reproduction de la statue à hauteur des yeux, puis laissez votre attention se poser doucement sur son visage, et plus précisément sur son regard. 

    Ce regard très direct, d’une tranquillité profonde, semble jaillir de l’image pour vous conduire à un état de conscience claire libre de toute saisie, l’état de méditation.

     Laissez alors votre esprit dans la paix et la tranquillité, dans la présence de Padmasambhava. 

     

  • La récitation d’un mantra
  • Une seconde technique, largement utilisée dans le bouddhisme tibétain - ainsi que dans le soufisme, le christianisme orthodoxe et l’hindouisme - consiste à unir l’esprit au son d’un mantra. 

    La définition du mantra est “ce qui protège l’esprit”. 

    Ce qui protège l’esprit de la négativité, ou encore ce qui vous protège de votre propre esprit, est appelé mantra. 

    Quand vous vous sentez agité, désorienté, ou dans un état de fragilité émotionnelle, réciter ou chanter un mantra de façon inspirante peut modifier complètement votre état d’esprit, en transformant son énergie et son atmosphère. Comment cela est-il possible ? 

    Le mantra est l’essence du son, et l’expression de la vérité sous forme de son. Chaque syllabe est imprégnée de puissance spirituelle : elle est la cristallisation d’une vérité spirituelle et vibre de la grâce de la parole des bouddhas. 

    Il est dit que l’esprit chevauche l’énergie subtile du corps et les purifie. Quand vous récitez un mantra, vous chargez votre souffle et votre énergie de l’énergie même du mantra, ce qui influe directement sur votre esprit et votre corps subtil.

    Le mantra que je recommande à mes étudiants est OM AH HUM VAJRA GURU PADMA SIDDHI HUM (que les Tibétains prononcent Om Ah Houng Benza Gourou Péma Siddhi Houng). 

    C’est le mantra de padmasambhava, le mantra de tous les bouddhas, de tous les maîtres et de tous les être réalisés. 

    A notre époque violente et chaotique, ce mantra possède une puissance de paix et de guérison, de transformation et de protection incomparable. 

    Récitez-le doucement, avec une attention profonde, et laissez votre souffle, le mantra et votre conscience, graduellement, ne faire qu’un. ou bien chantez-le avec inspiration et détendez-vous dans le profond silence qui s’ensuit parfois. 

    Même après une vie entière de pratique, il m’arrive encore parfois d’être émerveillé par le pouvoir d’un mantra.

    Il y a quelques années de cela, j’animais à Lyon un stage auquel participaient trois cents personnes. 

    J’avais parlé toute la journée, mais le public semblait vouloir profiter au maximum de ma présence et me posait, sans pitié ni relâche, question sur question. 

    A la fin de l’après-midi, j’étais complètement épuisé et une atmosphère morne et lourde planait sur toute la salle.

    Alors, je chantai le mantra que je vous ai enseigné ici.

    Le résultat fut surprenant : en quelques instants, je sentis la totalité de mon énergie revenir ; l’atmosphère de la salle fut transformée et l’auditoire m’apparut à nouveau animé et plaisant. J’ai connu à maintes reprises des expériences de ce genre, et je sais donc qu’il ne s’agissait pas là d’un “miracle” accidentel.

     

  • “Observer” la respiration
  • Cette troisième méthode est très ancienne et on la trouve dans toutes les écoles du bouddhisme. Elle consiste à laisser reposer son attention sur la respiration, avec légèreté et présence. 

    La respiration est la vie, l’expression essentielle et la plus fondamentale de notre existence. 

    Dans le judaïsme, ruah, le souffle, signifie l’esprit de Dieu qui baigne la création.

    Dans le christianisme également, il existe un lien profond entre l’Esprit Saint, fondement de toute vie, et le souffle. 

    Dans l’enseignement du Bouddha, le souffle, prana en sanscrit, est appelé le “véhicule de l’esprit”, car c’est le prana qui insuffle à l’esprit sa mobilité. 

    Aussi, calmer l’esprit en travaillant habilement sur la respiration, accomplit en même temps automatiquement la pacification et l'entraînement de l’esprit. 

    N’avons-nous pas tous fait l’expérience, lorsque la vie est trop agitée, de la douce détente que procure le fait de s’isoler quelques instants tout en respirant simplement, au rythme d’inspirations et d’expirations profondes et calmes ? 

    Même un exercice aussi simple que celui-ci peut s’avérer une aide précieuse. 

    Aussi quand vous méditez, respirez normalement, comme à l’accoutumée. portez légèrement votre attention sur l’expiration. 

    Chaque fois que vous expirez, laissez-vous porter par le souffle. A chaque expiration, vous lâchez prise et abandonnez toute saisie. 

    Imaginez que votre souffle se dissout dans l’espace de vérité qui pénètre tout. chaque fois que vous expirez, et avant l’inspiration suivante, vous découvrez qu’il existe un intervalle naturel, une fois la saisie dissoute. 

    Reposez-vous dans cette brèche, dans cet espace libre. 

    Et lorsque vous inspirez de façon naturelle, n’accordez pas à l’inspiration une attention particulière, mais permettez plutôt à votre esprit de demeurer en paix dans l’intervalle ainsi révélé. 

    Il est important, quand vous pratiquez, de ne pas vous laisser entraîner à un commentaire mental, ni à un bavardage intérieur. 

    Ne confondez pas le commentaire mental de votre esprit - “maintenant j’inspire, maintenant j’expire”- avec l’attention. 

    Ce qui compte, c’est la pure présence.

    Ne vous concentrez pas trop intensément sur la respiration. 

    Cela est très important, les maîtres conseillent toujours de ne pas se fixer lorsqu’on pratique la concentration du “repos calme”. 

    C’est pourquoi ils recommandent d’accorder à peu près vingt-cinq pour cent d’attention au souffle. 

    Mais comme vous pouvez le constater, l’attention seule n’est pas suffisante. 

    Lorsque vous êtes en train d’observer le souffle, vous vous retrouvez après une ou deux minutes au milieu d’un match de football, ou jouant le rôle principal dans votre propre film. 

    C’est pourquoi vingt-cinq autres pour cent seront consacrés à une conscience soutenue et continuelle qui supervise et vérifie que vous êtes toujours attentif au souffle. 

    On laissera les cinquante pour cent restants de l’attention dans une détente spacieuse. 

    A mesure que votre respiration deviendra plus consciente, vous constaterez que vous êtes davantage présent, que vous rassemblez tous les aspects fragmentés de vous-même et trouvez la plénitude. 

    Plutôt que d'”observer” la respiration, identifiez-vous graduellement à elle, comme si vous deveniez le souffle. 

    Peu à peu, la respiration, celui qui respire et l’acte de respirer deviendront un. 

    La dualité et la séparation s’évanouiront. 

    Vous découvrirez que ce procédé d’attention très simple filtre vos pensées et vos émotions. 

    Alors, comme si vous vous dépouillez d’une vieille peau, quelque chose se détachera de vous et se libérera. 

     

    Les trois méthodes en un.

    Chacune de ces trois méthodes constitue une pratique de méditation complète en soi. 

    Cependant, après avoir enseigné de nombreuses années, il m’est apparu particulièrement efficace de les combiner en une seule pratique, dans l’ordre proposé ici. 

    Premièrement, laisser reposer votre esprit sur un objet peut transformer votre environnement extérieur, agir au niveau de la forme et du corps.

    Deuxièmement, réciter ou chanter un mantra peut purifier votre monde intérieur du son, de l’émotion et de l’énergie.

    Troisièmement, observer le souffle peut pacifier la dimension la plus secrète de l’esprit, ainsi que le prana, le “véhicule de l’esprit”. 

    Ainsi, les trois méthodes agissent respectivement sur les trois aspects qui nous composent : corps, parole et esprit. 

    Lorsque vous les pratiquez, l’un conduit au suivant, et vous permet de trouver une paix et une présence de plus en plus stable. 

    Commencer par laisser reposer votre regard sur un objet, disons la photographie de Padmasambhava. 

    Regardez son visage. 

    La paix émane d’une telle image sacrée. 

    Le pouvoir de sa bénédiction apporte une sérénité telle que le simple fait de la regarder vous apaisera. 

    Et de plus, elle évoque le Bouddha en vous, elle vous le rappelle. 

    Elle servira d’objet de méditation, mais elle transformera aussi l’environnement ambiant, conférant une profonde tranquillité à l’atmosphère de votre méditation. 

    Si vous le souhaitez, tandis que vous regardez le visage de Padmasambhava, invoquez la bénédiction et la présence de tous les bouddhas. 

    Ensuite, récitez le mantra, et laissez le son transformer l’énergie de votre esprit et purifier vos émotions. 

    Essayez de la chanter à voix haute. 

    Chantez avec autant d’inspiration et de sentiment que possible, votre tension nerveuse en sera relâchée. 

    Puis, reposez dans le profond silence qui suit. 

    Vous réaliserez que votre esprit est naturellement plus tranquille, plus centré, plus souple et paisible. 

    Vous pouvez aussi réciter le mantra en murmurant ou en silence. 

    Parfois, notre esprit est trop agité pour être en mesure de se centrer immédiatement sur la respiration. mais si vous pratiquez un petit moment sur les deux premières méthodes, quand vous en arrivez à l’attention au souffle, votre esprit est déjà plus pacifié. 

    Maintenant, vous pouvez demeurer, en observant la respiration silencieusement. 

    Continuez ainsi, ou bien, après un moment, revenez à la pratique qui vous attire le plus. 

    Consacrez le temps que vous souhaitez à chaque méthode avant de passer à la suivante. 

    Peut-être constaterez-vous que, parfois, unifier la pratique en utilisant les méthodes dans cet ordre est fructueux, et parfois, utiliser une seule méthode - observer le souffle ; elles trouvent cette méthode presque claustrophobique, et l’objet ou le mantra leur conviennent mieux. 

    L’important est de faire ce qui vous est le plus profitable, ce qui convient le mieux à votre humeur. 

    Soyez inventif, mais essayez d’éviter de sauter d’une méthode à l’autre une fois que vous en avez choisi une. 

    Appliquez avec sagesse la pratique appropriée à votre besoin spécifique du moment : c’est ce qu’on entend par “être habile”. 

     

    Pour retourner à la page globale sur la Méditation I de Sogyal Rinpoché, cliquer ici avec gratitude pour ses enseignements